- Les Envahisseurs Arrivent (Un paysan, pourchassé par des barbares, reste coincé derrière une porte)
- Mauvaise Tour : Mauvais Tour (parodie d'un prince charmant venant libérer sa belle)
- J'ai occis un Dragon (dialogue comique entre un vaurien et un paladin, la ruse face à la vertu)
1-Les Envahisseurs arrivent !
Un paysan arrive en courant, paniqué, en jetant un coup d’œil
derrière lui.
Il marque un temps d’arrêt
à mi-chemin de la porte de la forteresse, la voyant fermée.
Il s’exclame en reprenant sa course : Ouvrez vite, mes
poursuivants peuvent arriver d’un moment à l’autre !
Le paysan se jette alors sur la porte, qu’il frappe à coups
redoublés.
Devant l’absence de réponse, il s’écrit : Ouvrez
donc ! …N’avez-vous aucune pitié pour l’un de vos frères resté à la merci
de l’ennemi !
Une voix enraillé de garde fini par répondre du fond de son
abri : Non !!
Le Paysan : Comment ça non ?
Le Garde : On ouvre plus, c’est tout.
Le Paysan : Ecoutez, j’étais parti chercher du bois
lorsque les Envahisseurs ont surgi du fond des bois.
J’ai tout juste eu le temps de rejoindre les remparts en
courant à bâton rompu…
Le Garde : Eh bien vous avez couru pour rien ! …On
va pas risquer nos vies pour un simple
manant !
Le paysan s’effondre devant la porte en laissant
glisser ses deux bras le long du bois ; et se retrouvant à genou se met à
gémir. Il se prend la tête dans les mains au comble du désespoir.
Puis l’instinct de survie reprend le dessus. Il se retourne
précipitamment pour voir l’avancée des envahisseurs. Il perçoit le reflet métalliques de plusieurs
casques en mouvement en contrebas de la bute.
Dans un frisson de terreur, il parvient à articuler : Ils
arrivent !!! Les Vikings....sont la !!!
Le Paysan : Soyez maudit, si vous n’ouvrez pas
immédiatement !
Le Garde : Cachez-vous pauvre diable ou fuyez !
C’est le seul ressort qui vous reste !
Toujours agenouillé, le dos à la porte, le paysan, dans une
posture de prière se met à réciter un notre père à peine audible, en se signant
machinalement plusieurs fois.
Puis il suffoque dans un dernier râle de haine, entendant
des pas lourds se rapprocher : Puissent ces hordes de barbares déchaînées
vous ramener en enfer !
Il continue alors ces prières, avec une ferveur frénétique,
comme si sa dévotion religieuse allait le protéger des violents coups de haches
des guerriers du nord en approche.
L’un de ces guerriers surgit soudain de la pente, les yeux
plein de rage. Voyant le pitoyable paysan à terre, il entreprend de lui donner
un puissant coup de pied dans le thorax, qui le projette en arrière contre la
porte, et manque de le tuer sur le coup. Incapable de la moindre réaction, le
pauvre homme se laisse soulever comme un fétu de paille par un bras musclé,
tandis qu’un autre l’empale sauvagement avec son épée, à hauteur de ventre. Sa
dépouille ensanglantée orne désormais la porte de chaîne, comme un témoin muet
de la fureur des Vikings.
Le sac de la forteresse peut commencer…
2-Mauvaise tour : mauvais tour
L’infortuné D’Armand
veut retrouver sa promise, retenue par le Duc de Lingessal, dans l’une des tours
de son château de Lanstelle. Même s’il est communément admis que les princesses
emprisonnées se trouvent effectivement dans les tours ; le jeune homme au
grand cœur mais aux bourses vides qui nous sert de héros, ignore laquelle.
Sortant discrètement
du couvert des bois, D’Armand entreprend l’ascension des remparts hauts d’une
dizaine de mètres, avec une habileté déconcertante. Arrivé au sommet, il amorce
une petite roulade élégante, rien que pour le style, qui s’achève gracieusement
derrière un créneau ; et observe les deux gardes qui encadrent l’entrée de
la tour. Notre escrimeur détache un morceau des pierres de mauvaise qualité qui
composent la muraille, et le jette avec précision du côté opposé du chemin de
ronde, à cinq mètres à peine des gardes. Cette brève diversion suffit au héros
pour bondir de son abri, et en un éclair, atteindre le premier garde, distrait,
qui n’a pas le temps de réagir avant qu’une poignée d’épée vienne percuter sa
tête, avec une précision assommante. Animé par la rage du cœur, D’Armand surgit
à la gauche du second garde qui venait juste de dégainer, lui assenant une petite
touchette au bras droit savamment ajustée. Ainsi déstabilisé, l’homme d’arme ne
tient que deux échanges, avant de se retrouver la cuisse perforée, puis d’être
assommé à son tour galamment par une main experte.
Face à la porte, D’Armand clame d’une voix théâtrale :
N’ayez crainte ma Dulcinée, le bras vengeur de mon amour vient vous délivrer de
l’infâme emprise du Duc. Je vous prie succinctement d’ouvrir la porte de cette
tour , afin que notre amour, enfin libéré, puisse s’épanouir dans l’air léger
du printemps…Et que votre dignité ne souffre plus avant du confinement malsain
de ses murs crasseux.
Une voix trop aigrie pour provenir d’une femme
non-ménopausée lui répond, mi-figue mi-raisin : Ah ! Vous êtes une
sorte de prince charmant ?
D’Armand : Un prince charmant, un chevalier servant, l’ange
gardien de votre cœur !
La Vieille femme : Eh ben foutez-moi le camp
alors ! J’en ai soupé des princes charmant !
D’Armand, perdant une partie de son élan verbal : Je
crois qu’il y a méprise ma douce ; je ne voulais en rien vous importuner ;
mon seul but est de vous libérer….et qu’est-il arrivé à votre auguste
voix ? Elle semble plus âpre…
La Vieille femme : Elle a vieilli…comme le reste…à
force d’attendre des beau-parleurs comme vous !
D’Armand, interloqué, réfléchit quelques instants, en effectuant
plusieurs va et vient face à la porte. Il s’exclame enfin : Ah j’y
suis ! Quelqu’un vous a jeté un sort. Sans-doute cette vieille sorcière de
Grima, jalouse qu’une telle opportunité s’offre à sa nièce. Eh bien sachez que
je mettrais tout en œuvre pour la retrouver et la forcer à inverser les effets
du sort !
La Vieille femme : Triple crétin, vous ne comprenez
décidément rien à rien ! C’est de moi dont vous venez de parler ! Et
je ne saurais tolérer davantage les quolibets d’un saltimbanque de votre espèce !
Allez donc retrouver votre si fabuleuse princesse à la tour sud ; vous
allez vite vous apercevoir qu’elle n’est
pas plus charmante que vous. Débarrassez-nous donc le plancher avec votre jeune
effrontée ; Lanstelle retrouvera peut-être un semblant de calme sans
ses puérilités vulgaires ! Et ne revenez jamais !! Vous m’avez
comprise ? Jamais !!
D’Armand, fortement embarrassé : Euh…oui Je crois qu’il
y a méprise… J’ai du me tromper de tour…La tour sud vous avez dit ?....Bon
bah je vous laisse Madame…Aux plaisirs…
La vieille Grima : Foutez-moi le camp !
3-J’ai occis un dragon
Un paladin, posté
devant l’entrée d’une auberge, voit arriver un vaurien le sourire aux lèvres.
Le Paladin : Eh toi là-bas ! Oui toi ! Avec
ton air benêt !
Le mécréant s’approche
hésitant, mais manifestement toujours gai.
Le Paladin : J’entends bien savoir ce qui rend si
joyeux un malfrat de ton espèce, alors que tu n’as pas encore franchit le seuil
de la taverne ? D’habitude, les gredins dans ton genre, passent la tête basse
devant moi ; ils ne retrouvent leur vil sourire, qu’une pinte de bière à
la main, ou en cherchant les faveurs d’une ribaude.
Le Mécréant : Non Monseigneur, vous vous méprenez ! J’apporte avec moi une
nouvelle d’importance! Vous ne devinerez jamais ce qui m’est arrivé ?
Le Paladin : Non, en effet, c’est pour ça que tu vas me
le dire ; sur le champ.
Le Mécréant : J’ai accompli un exploit que nul n’a égalé
depuis des générations !
Le Paladin : Ah vraiment ; et quel est-il ?
Le Mécréant : Ma vie ne sera plus jamais la même après
ça, s’en est fini de cette vie de misère et de vilipandage !
Le Paladin : Quoi ? Aurais-tu trouvé par mégarde
un joyau égaré dans la poche d’un noble ?
Le Mécréant : Je finirais sûrement héros du
Royaume ; et dans le pire des cas conteur
d’histoires extraordinaires.
Le Paladin : Outre le fait que ta vie m’importe peu ,
je la vois davantage finir sous la hache d’un bourreau. Mais qu’a-tu fait au
juste ?
Le Mécréant : J’ai vaincu l’invincible. Je me suis
battu vaillamment, et j’ai triomphé d’une des plus viles créatures qu’ait donné
la terre.
Le Paladin : Vaillamment ? Ce mot sonne creux dans
ta bouche. Il suffit de tes balivernes ! Dis-moi de quoi il retourne à la
fin ; ou ma lame sacrée te déchargera de ce secret !
Le Mécréant : Euh oui, toutes mes excuses Monseigneur…
eh bien pour être clair, j’ai…
Le Paladin : Parle !
Le Mécréant : …..En toute modestie, j’ai occis….un
dragon.
Le jeune vaurien voit
passer le visage du paladin du rouge au rose pâle en quelques secondes.
Le Paladin : Tu as occis un DRA-GON ?!
Le Mécréant, sentant une bouffée de fierté l’envahir :
Oui, j’ai occis un dragon !!
Le Paladin se reprend : Quelle farce tu me joues là mécréant ?
« Un dragon », sais-tu seulement de quoi tu parles ? Que toutes
les foudres du ciel me traversent, si tu dis la vérité !
Le Paladin : Dis-moi, ce « dragon », n’était-il pas juché sur une pierre, se
faisant doré l’échine au soleil ? Un lézard, en somme.
Le Mécréant : Non Monseigneur ; il faisait bien
deux toises de longs, avec des écailles coriaces et des griffes acérées. Sa
gueule, suppurante de pus, était garnie de dents tranchantes ; il aurait pu
m’arracher la main, d’une simple morsure !
Le Paladin : ...Et puis-je savoir avec quel « glaive
vengeur », as-tu occis la créature ?
Le Mécréant : Ce couteau.
Le Paladin : C’est absurde. Tu n’avais aucune allonge
pour rester à distance du dragon, aucune armure pour te protéger de ces
griffes ! Les Paladins sont spécialement entraînés et équipés pour faire
face à de telles abominations. Nous
utilisons des épées bénies et des hallebardes forgées dans les meilleurs
alliages, et les armures de plates les plus solides ! ...et toi tu prétends
être venu à bout d’une de ces bêtes, armé d’un simple couteau de cuisine ! Qui de surcroit, a dû être dérobé dans un des
cloaques crasseux des faubourgs.
Le Mécréant : l’exploit n’en est que plus
incroyable !
Le Paladin : Incroyable, en effet ; c’est un beau
tissu de mensonge. Je ne puis supporter plus longtemps ton insolence ; donnes-moi
une preuve de ce que tu avances, ou je te livre aux geôliers !
Le Mécréant : Oui justement ! Attendez ; je l’ai enveloppé dans un chiffon….là
regardez ; j’ai récupéré sa patte !
Le Mécréant tend ce
qui pourrait bien être une patte de reptile à l’homme d’arme.
Le Paladin : oui….intéressant….cela pourrait bien être
un dragon. Pas de grande taille, mais….
..Et pourquoi n’avoir pas pris sa tête ; c’est un bien meilleur trophée ?
Le Mécréant : Le couteau coupait trop mal ; je
n’ai pas réussi….Mais, me croyez-vous à présent ?
Le Paladin : Quelle pitié, quelle déchéance ! Une
légendaire créature conduite à trépas par le premier nigaud venu ! Les
valeurs se perdent, vraiment. De toute façon ce n’était qu’un jeune. Et puis,
il y a pire comme menace que les dragons : les mort-vivants et autres
spectres qui hantent nos contrées. Des créatures sournoises qui se cachent dans
l’ombre et pervertissent les âmes des honnêtes gens. Le dragon a au moins la
courtoisie de t’affronter de face !
Le Mécréant : Sans doute oui ; ils sont
certainement plus terribles…
Le Paladin : Peut-être qu’une de ces abominations se
tapit dans la nuit à quelques enjambées ; sans que nous en sachions rien !
Le Mécréant : Euh oui ; je n’en doute point. Mais
permettez-moi de rejoindre mes camarades de l’auberge ; j’ai fort à leur
raconter !
Le Paladin : Non malandrin ! Garde donc cette
histoire pour toi !
Le Mécréant : Mais, je ne puis passer sous silence un
tel exploit !
Le Paladin : Et pourtant, il le faudra bien ; c’est
moi qui suis censé m’occuper de tels monstres. Si l’on apprend qu’un rebut s’est chargé de la
tâche, ma réputation risque d’en pâtir.
Le Mécréant : Le poids de quelque argent pourrait
empêcher ma langue de fourcher.
Le Paladin : Blasphémateur ! Truand ! Espère-tu corrompre un soldat
de Dieu ?
Le Mécréant : Votre réputation vaut bien une pièce.
Le Paladin : Quelle ignominie ! C’est le créateur
lui-même que tu insultes avec une telle offre !
Trahissant ces
paroles, le Paladin, tend alors une pièce à contrecœur au malfrat ; qu’il lâche cependant
difficilement, comme s’il devait se défaire d’une bourse entière.
Le Mécréant : Merci Monseigneur ; vous constaterez
que mon silence est d’or.
Le Paladin : Devrais-je également récompenser le diable
pour ces méfaits ?
Hors de ma vue mécréant ! ...et n’oublie pas ta parole,
ou j’oublierais à mon tour ma miséricorde.
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